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Le café culture

Activité variable (concours obligent), mais la promesse c'est un peu de culture à chaque fois. Et surtout d'ouvrir la réflexion sur une oeuvre, pas simplement de constater son existence.


Se7en, le classique oublié

Publié par Corentin Delorme sur 7 Novembre 2022, 21:01pm

Catégories : #Cinéma

Cela fera 26 ans au mois de janvier. Il y a 26 ans, David Fincher livrait Se7en, peut-être un des meilleurs films policiers de l'histoire du cinéma, mais à chacun de se faire son avis. Malgré son succès critique et commercial, et bien qu'il soit parfois évoqué parmi les classiques du cinéma, il s'agit d'un film qui semble encore trop peu connu du public, étonnant pour un long-métrage de cette qualité. Alors voici quelques raisons pour lesquelles vous devriez définitivement regarder ce film, en essayant de ne pas trop vous spoiler.

 

Une idée simple ?

 

L'idée de départ ne semble pas bien compliquée, et effectivement on pourrait dire qu'elle ne l'est pas. David Mills (Brad Pitt), inspecteur de police, est transféré dans le commissariat d'une grande métropole américaine (non nommée, on y reviendra), où il rencontre William Somerset (Morgan Freeman) qu'il est censé remplacer. Les événements font qu'ils se retrouvent à travailler tous les deux sur une affaire de tueur en série. Bon, jusque là rien de bien nouveau ou de franchement emballant. Sauf que ce tueur en série, et bien ce tueur a une particularité, et cette particularité c'est le mobile de ses meurtres. Il tue uniquement des personnes pour lesquelles il estime qu'elles ont commis un des sept pêchés capitaux, voilà qui rend le sujet déjà plus intéressant. Si jamais vous êtes journaliste ou journaliste en devenir, c'est ce que l'on pourrait appeler un angle d'attaque original. Ce qui est assez étonnant, c'est que ce côté religieux qui vient quand même construire toute l'intrigue du film mine de rien, ne se ressent pas tant que cela au visionnage. Certes le personnage de Somerset doit bien effectuer quelques recherches à la bibliothèque pour se plonger dans les divers textes qui parlent de ces pêchés capitaux, mais ce n'est pas pesant, et la religion n'est pas partie prenante du film à l'image. C'est une sorte de jeu de funambule, sur un fil entre cet aspect religieux non négligeable puisqu'il structure tout le film, mais qui est en même temps assez effacé et on a rarement l'impression face aux images qu'on voit que l'intrigue tourne autour d'une croyance chrétienne aussi importante que celle des pêchés capitaux. 

 

Outre cela, le leitmotiv du duo de flics avec un jeune un peu fougueux et un vieux que le métier a assagi se retrouve aussi dans ce film. Et ce qui est assez nouveau, c'est que chacun des deux personnages reste bien droit dans ses bottes, contrairement à ce qui pourrait être vu dans d'autres films. Il n'y a, presque bizarrement, pas tant d'évolution des deux personnages que cela, alors qu'on pourrait se dire qu'une telle enquête va profondément changer les deux protagonistes, et quelque part c'est un peu le cas quand même. Je m'explique. Si, en surface, Mills et Somerset paraissent rester fidèles à eux-même au long de l'intrigue, quelque chose dans l'enquête qu'ils mènent va profondément les changer. Contrairement à ce qui existe dans d'autres films policiers, il n'y a pas d'amitié à proprement parler qui se développe entre les deux personnages, c'est une relation qui reste globalement professionnelle. Pourtant, quelque chose dans leur perception de la vie va changer lorsque chacun va se retrouver au contact de son nouveau coéquipier, Somerset comprenant qu'il a peut-être raté quelque chose dans sa vie, l'aspect familial, Mills réalisant que sa vie ne tient qu'à un fil vu son comportement, et qu'il devrait sûrement s'inspirer de son camarade. Cela, c'est ce dont ils se rendent compte au cours de l'intrigue, mais à la fin, ils reviennent chacun à leur place, et leur vraie nature va reprendre le dessus et ce jusqu'à l'ultime scène du film. Quelque part, c'est une complexité de la personnalité humaine qui est explorée, et une forme de stagnation qui lui est attribuée ici. On a beau évoluer, on semble toujours revenir à qui l'on est vraiment, quite à en payer les conséquences.

 

Montée en tension et explosion

 

Ce film, c'est un morceau de musique, qui ne connaît que le crescendo. Toutes les intrigues sont construites de façon à ce qu'il y ait une montée en puissance, avant d'arriver à un point culminant pour ensuite laisser la place à la résolution. Ici, on pourrait se dire que les choses sont simples et que ce schéma très sommaire de la construction d'une intrigue est respecté, mais en fait pas tant que ça. Se7en, c'est une montée en puissance, un point culminant, mais il n'y a pas vraiment de résolution ou de dénouement. Il serait même possible de dire que le point culminant fait office de résolution de l'intrigue, puisque c'est là que tous les mystères sont résolus, et ça ce n'est pas commun. Jusqu'au tout dernier moment, il n'y a pas cette explosion qui est attendue par le spectateur, mais lorsqu'elle arrive, elle est spectaculaire et met un terme à toute l'histoire d'un coup. C'est presque brutal, choquant, cette fin de film qui vous laisse un peu sans voix devant votre écran. Tout au long du film, on attend patiemment le dénouement de toute cette histoire, mais malgré tout on n'est pas préparé à cette explosion finale, qui est très bien amenée. Le suspense est parfaitement ménagé jusqu'au dernier moment, c'est un dénouement qui ne se dévoile pas et ne se laisse pas deviner, le spectateur est mené par le bout du nez, mais ça n'a rien de déplaisant.

 

C’est un crescendo oui, un dénouement qui ne se laisse pas voir. D’un bout à l’autre il y a une forme de montée en puissance dans l’histoire avant l’explosion finale. La construction du film est assez bluffante tant elle suit un chemin cohérent et logique. Les éléments de surprise pour le spectateur s’inscrivent bien dans l’ensemble et viennent servir l’intrigue plutôt que simplement provoquer un sentiment d’étonnement chez le spectateur, ce qui est assez rare pour être souligné. Des retournements de situation il y en a, des surprises en nombre également, mais toujours dans une optique de servir l’histoire racontée. Si vous vous attendez à un film prévisible, celui-ci n’est pas fait pour vous. Il faut accepter d’être impuissant face à ce qui se déroule sous nos yeux, c’est la dure loi de ce film. Tout le génie du film repose sur la façon dont l'histoire est construite et dont chaque nouvel élément est amené. Il y a comme un mécanisme d'horlogerie qui se dévoile à l'écran, soigneusement huilé, mais dont on ne parvient à saisir tous les rouages qu'à la toute fin, c'est-à-dire lorsque l'on voit le rendu final. C'est un peu ça aussi la magie du cinéma, parvenir à nous tromper en permanence sur ce que l'on voit, alors que la vérité est en train de se dérouler sous nos yeux.

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